Commentaires d'Yves Coleman et de Nico Dessaux sur le texte AWL de novembre 2003

Submitted by AWL on 24 June, 2005 - 12:14

ND : Voici quelques points de remarques jetées rapidement sur le texte. Je peux les développer si nécessaire, c’est-à-dire s’il y a une réelle volonté d’en discuter.

Je les ai ajouté à celles d’YC, dont je partage pour l’essentiel les remarques. Disons, à grands traits, que je trouve le projet très ancré d ans le passé, dans une histoire centrée sur le trotskisme, et la vision trop idéologique, plus idéaliste que vraiment matérialiste s’il faut utiliser les grands mots trop peu ancrée dans les changements actuels du capitalisme et de la classe salariée – comme si la référence à l’histoire interne du mouvement étouffait la compréhension du mouvement historique de la société mondiale. Il y a fréquemment contradiction entre la volonté affichée de renouveler le discours de la gauche – qui est d’ailleurs posée comme un but en soi – et la répétition faiblement critique d’un discours lui même peu renouvelé. Quand aux perspectives posées en dernière partie, elles m’apparaissent bien floues…

Projet de bases politiques,
rédigé par l'AWL
pour la réunion internationale du 10 novembre 2003 à Paris

1. Il existe aujourd'hui des ouvertures pour la gauche révolutionnaire telles que nous n'en avons pas connu depuis deux décennies. La formidable vague d'opposition à la guerre de Bush et Blair contre l'Irak, la montée des mouvements anticapitalistes, la croissance des nouveaux mouvements ouvriers dans les ex-pays coloniaux et le renouveau encore limité mais significatif d’un authentique syndicalisme dans quelques vieilles puissances industrielles se combinent pour créer cette situation.

NPNF/English : It would better to give some examples both in the ex colonial world and in the older industrial countries (for the latter I have some strong doubts).
NPNF/Français/Il vaudrait mieux donner quelques exemples à la fois pour les ex pays coloniaux (Afrique du Sud, Brésil, Corée du Sud ?) et pour les vieux pays industrialisés (en ce qui concerne ces derniers, j’éprouve quelques doutes).

ND : Difficile de s’appuyer sur deux mouvements qui reconnaissent être en crise (antiglobalisation, mouvement contre la guerre en Irak). Il vaudrait mieux, comme le souligne YC, partir d’exemples concrets de nouveaux mouvements de salarié-es dans différents pays, de ruptures significatives par rapport à l’ancien mouvement et sur les changements intervenus dans la composition mondiale de la classe ouvrière. D’autre part, le terme d’anticapitalisme est très flou, puisqu’un mouvement anticapitaliste peut être, selon les forces en présences et la situation réelle, communiste ou réactionnaire. La notion de syndicalisme authentique est elle-même floue : un syndicat peut avoir une véritable base salariée, une large indépendance vis-à-vis de l’état et du patronat, sans avoir de visées révolutionnaires. Il ne le devient de fait que lorsque les rapports de classe existants rendent ses revendications incompatibles avec l’ordre capitaliste – ce qui n’est toujours le cas. Je suis par contre d’accord avec l’idée qu’il existe une ouverture à gauche, mais je la fonderais plutôt sur les transformations des rapports sociaux à l’échelle mondiale, sur les changements de perspectives introduits par la globalisation croissante du capital.

2. Malheureusement, l'organisation unie de la gauche dont la classe ouvrière a besoin n'existe pas, pas plus d’ailleurs qu’une gauche marxiste politiquement solide.
NPNF : This remark is very general. What do you mean precisely by « adequate » ?
Cette remarque est très générale. Que signifie pour vous le terme « adéquate » ?

ND : D’accord avec YC. L’unité n’a pas de valeur « en soi ». Il convient de fixer des perspectives simples et claires. Si nous parlons de l’Europe, alors la question la plus urgente est celle des organisations de salariés à l’échelle européenne – qui ont plus de trente ans de retard sur celles du patronat. Si nous parlons du monde, la question concrète n’est pas d’aligner des sections dans chaque pays, mais d’organiser la solidarité effective entre organisations de différents pays, notamment entre pays » riches » et « pauvres », aussi sommaire que soit cette catégorisation. Le « malheureusement » est lui-même malheureux, car il tombe comme un simple constat, sans explication de cette absence, sans référence au mouvement réel de la classe ouvrière.

3. Il existe un nombre important d'organisations qui plongent leurs racines dans la tradition trotskiste — la tradition de ces communistes qui, dès le début des années 20, ont combattu la classe dirigeante stalinienne qui s’est emparée du pouvoir en URSS et a pris le contrôle des partis communistes. Mais ces groupes ont évolué et subi des mutations dans différentes directions au fil des décennies.
NPNF : From the start you choose to overstress the importance of one political tradition which not only has not made any balance of its defence of the USSR and the disappearance of a socalled workers states and several degenerated workers states but whose « trotskysm » has less and less meaning today for the younger generations. Who today knows the content of the First Four Congresses of the Third International ? Who is really interested by a discussion about the nature of the USSR ? Who knows what the « unconditional defence of the USSR » means ? Very few people, I’m afraid, even if these questions are obviously important.
If you want to mention Trotsky and trotskysm, it would be fair to mention that it took Trotsky a long time to understand what was happening in Russia. Let’s not forget that he fought against the other Left oppositions inside the Bolshevik Party (the Workers Opposition, the Democratic Centralism group, etc. and these discussions continued until the late 1930s inside Russian jails) and outside the Bolshevik Party (starting with the anarchists) ; he was first in favor of banning the fractions inside the Party ; he theorized the militarization of labor and the submission of trade unions to the State and the Party ; he approved the Cronstadt repression until his death ; he waited 1933 and Hitler’s victory to realize the width of the stalinist counter-revolution and the necessity of a new International, etc. If your aim, with this platform, is to integrate in the discussion other groups than trotskyst groups I would leave the question more open and quote other oppositions to Stalinism, and their positive or negative role.
Dès le départ de ce texte vous choisissez de donner une importance primordiale à une tradition politique qui non seulement n’a pas fait le moindre bilan de sa défense inconditionnelle de l’URSS pendant 60 ans ni de la disparition des prétendus Etats ouvriers déformés d’Europe de l’Est. Mais dont le trotskysme a de moins en moins de sens aujourd’hui. Si vous voulez mentionner l’importance des idées de Trotsky, vous devez aussi mentionner qu’il lui a fallu beaucoup de temps pour comprendre ce qui se passait en URSS. N’oublions pas que Trotsky a combattu toutes les autres oppositions de gauche au sein du Parti bolchevik (l’Opposition ouvrière, le groupe Centralisme démocratique, etc. et que les discussions ont continué jusque dans isolateurs de Vorkouta…), qu’il a d’abord été en faveur de l’interdiction des fractions dans le Parti, qu’il a théorisé la militarisation du stravail et la soumission des syndicats à l’Etat et au Parti, qu’il a approuvé la répression de Cronstadt jusqu’à sa mort, qu’il a attendu 1933 pour se rendre compte de l’ampleur de la contre-révolution stalinienne et de la nécessité d’une nouvelle Internationale, etc. Si votre objectif, avec cette plateforme, est d’intégrer d’autres groupes que des groupes trotskystes il me semble qu’il faudrait laisser la question plus ouverte et cite les autres oppositions au stalinisme à l’intérieur comme à l’extérieur des Partis communistes.

ND : Tout à fait d’accord avec YC. Sans rentrer dans l’histoire de l’Opposition, il vaudrait mieux simplement constater, prosaïquement, que des courants partis de points de départs très divergents sont finalement arrivés à des conclusions voisines sur la question de l’URSS, tandis que le courant trotskiste a éclaté en une kyrielle d’opinions opposés en tous points. Mais c’est encore une vision idéologique de la question : « l’opinion » qu’émet tel ou tel groupe, tel ou tel auteur sur la nature de l’URSS et du stalinisme n’est pas sans rapport avec sa propre position dans le rapport de classes. Ce qui importe, c’est de savoir si ces courants ont cherché une explication dans un cadre d’analyse fondé sur l’exploitation, le salariat et la lutte de classes, ou non – c’est la différence entre un communiste et un moraliste.

4. Généralement, ces groupes sont devenus des sectes plus ou moins autoritaires. Depuis de très nombreuses années, les groupes et groupuscules de l'archipel néo-trotskiste ont peu de contacts entre eux, et ne collaborent pratiquement jamais, même sur les questions à propos desquelles ils sont pourtant d’accord. Ils n’entretiennent pas non plus de dialogue sur les problèmes politiques qui les divisent.
NPNF : Once more your perspective is limited to the trotskyst world which I doubt will radically change in a positive direction in the future. Why not mentioning other political forces, marxist or anarchist, or even ecologist or feminist if they have a socialist agenda, which exist on the international scale ?
Encore une fois ce point est rédigé dans une perspective limitée à « l’archipel trotskyste » qui ne risque guère de changer radicalement dans un futur proche. Pourquoi ne pas parler des autres forces politiques marxistes ou anarchistes, voire écologistes ou féministes si elles ont une perspective socialiste, qui existent à l’échelle internationale ?

ND : Le problème de cette approche, c’est qu’elle jette dans le même sac tous les courants, en dehors de leur ancrage dans la lutte de classes. Si on prend l’exemple français, il est difficile de comparer, plus encore de vouloir faire discuter, Lutte ouvrière – qui est relativement en phase avec la réalité influence effectivement des milliers de salariés – et la Ligue trotskiste de France, qui vit en dehors du réel et ne touche que quelques dizaines de personnes. La taille n’est pas en soi un critère, mais la capacité à s’intéresser au réel en est un.

5. Que pouvons-nous faire pour remédier à cette situation? Pour le savoir, il faut d’abord comprendre comment nous en sommes arrivés là.

6. La politique révolutionnaire est un processus incessant de groupement et de regroupement autour des réponses politiques que nous apportons aux problèmes présents, réponses qui ont des conséquences sur tous les plans.

7. Il y a 80 ans, les partis communistes se sont séparés des partis sociaux-démocrates et ont fondé, à la suite de la Révolution russe, une nouvelle Internationale ouvrière (l'Internationale communiste). Ils étaient décidés à s’inspirer des leçons de la victoire de la classe ouvrière en Russie en 1917 pour les appliquer eux-mêmes dans d’autres pays.
NPNF : Same problem as before. This point implies that everybody agrees about the meaning of October 1917. It should be written in a more open way.
Même problème que précédemment. Ce point suppose que tout le monde est d’accord sur la signification d’Octobre 1917. Il me semble qu’il faudrait que la rédaction de ce point soit plus ouverte.

ND : Parler de victoire est un peu osé… Une victoire politique ne s’apprécie pas dans l’instant, mais dans ses effets à long terme. Si on dit que le comité militaire révolutionnaire a pris le palais d’Hiver, c’est un simple constat, mais ça ne nous même pas loin. Si on dit que la prise du pouvoir par le POSDR (b) et la création du Komintern ont eu un impact majeur sur le vingtième siècle, si on dit que ce Komintern a tenté d’exporter ses recettes, on reste dans le constat. Mais force est de constater que les recettes n’ont pas marché, ni en URSS, ni ailleurs – sans quoi, nous ne serions pas en train de discuter, nous aurions la joie de vivre dan un monde socialiste débarrassé des militants d’extrême-gauche.

8. Le mouvement trotskyste, qui a défendu et repris à son compte les bases politiques originelles de l'Internationale communiste, a été, lui aussi, le produit d'un événement international qui a changé la face du monde, mais a été négatif pour la classe ouvrière : la contre-révolution stalinienne en URSS.

ND : C’est une lecture un peu réductrice de l’histoire du Parti communiste russe, de la troisième internationale et de l’opposition. Le courant bordiguiste pourrait écrire la m^me chose, de même que tous les courants de l’opposition léniniste qui n’étaient pas d’accord avec Trotski, qui étaient plus nombreux et souvent plus influents (à commencer par le POUM espagnol). Sans parler d’autres groupes également issus du Komintern, comme les partis communistes ouvriers d’Allemagne, de Hollande et de Russie dans les années 20. Quelque soit le jugement politique que l’on porte sur ces courants, on ne peut leur denier le droit à l’histoire. Le seul côté positif, c’est de constater que l’existence même du trotskisme est un produit de la contre-révolution en Russie. Il faudrait logiquement en conclure qu’il ne lui reste plus qu’à s’éteindre avec l’URSS.

9. Les principaux partis communistes et l'Internationale communiste sont tombés sous le contrôle de l'autocratie stalinienne qui avait pris le pouvoir en Russie. Durant les crises mondiales des années 1920, 1930 et 1940, les organisations qui, sous la direction de Léon Trotsky, ont défendu les positions originelles de l'Internationale communiste, ne formaient que des groupes minuscules. Leurs militants ont été persécutés et souvent emprisonnés ou assassinés par les fascistes, les staliniens et les démocraties bourgeoises.

NPNF : Il n’y a pas eu que des groupes trotskystes antistaliniens. Cette vision de l’histoire des oppositions au stalinisme est réductrice.

ND : Même remarque que précédemment. On ne peut pas faire un travail militant sérieux sur la base d’une hagiographie historique. Ce n’est pas faire insulte aux militant-es trotskistes de ces années que de reconnaître qu’ils / elles n’étaient pas seul-es.

10. Après 1945, le monde a considérablement changé et sur de nombreux plans. L'ancienne division du monde entre des empires coloniaux rivaux dont les centres de commandement se situaient en Europe, et qui étaient séparés par des barrières douanières étanches, a progressivement été remplacée par une nouvelle division du monde entre, d'un côté, un empire stalinien, et, de l'autre, un « impérialisme du libre échange » dominé par un cartel de grandes puissances capitalistes dirigé par les Etats-unis.

11. L'URSS, qui avait dégénéré sous le régime stalinien et s’était déjà transformée en un nouveau système d'exploitation de classe, est devenue, après 1939-40, un nouveau centre impérialiste. Elle allait imposer et conserver sa domination politique sur l'Europe de l'Est jusqu'en 1989. D’autre part, les pays coloniaux ont connu globalement deux situations différentes : soit les luttes de libération nationale ont permis de conquérir l'indépendance politique ; soit les puissances coloniales ont décidé de leur accorder l'indépendance sans combattre. Dès les années 60, quelques-uns de ces Etats nouvellement indépendants sont devenus des centres d'accumulation capitaliste d'une importance significative quoique secondaire.

ND : Il faudrait, pour dire cela, commencer par affirmer qu’à un moment donné l’exploitation avait disparu en URSS et qu’elle aurait été restaurée par le régime stalinien. Lénine, qui appelait un chat un chat, considérait ouvertement le capitalisme d’état comme un objectif à atteindre et n’a jamais prétendu avoir aboli l’exploitation.

12. Au sein du mouvement ouvrier et de ses organisations de masse, les mots de «socialisme» et de «communisme» ont été monopolisés et déformés par les Partis communistes et sociaux-démocrates, organisations politiquement corrompues depuis des décennies.

13. Après 1968 une nouvelle gauche révolutionnaire est apparue, mais elle n'est pas arrivée à opérer une distinction suffisamment nette entre le socialisme qui exprime les intérêts de la classe ouvrière et les courants révolutionnaires du stalinisme. Cette nouvelle gauche a donc eu tendance à se disperser et à s'affaiblir à partir du milieu des années 70.

NPNF : Malgré les précisions apportées par l’amendement sur le stalinisme, ce point implique un accord total avec la théorie du collectivisme bureaucratique. Est-ce indispensable ?

ND : C’est une vision très idéologique des événements, fondée sur le mouvement des idées plutôt que sur celui des rapports sociaux. La rupture dans le champ des idées est largement précédée par une rupture dans la classe ouvrière : montée de l’ouvrier spécialisée aux dépens de l’ouvrier qualifié, immigration massive, augmentation du travail des femmes, systématisation du travail à la chaîne, etc…D’autre part, la plupart des courants « étudiants » ne se distinguaient en rien des courants radicaux (plutôt que révolutionnaires) du stalinisme (maoïsme, castrisme, guévarisme nationalisme de gauche,…), quand bien même ils se déclaraient trotskystes ou même libertaires. Leur reprocher d’avoir mal compris le socialisme est une lapalissade.

14. Le monde a de nouveau changé après les années 1989-91. L'effondrement du stalinisme a montré que le modèle stalinien du «socialisme» n’avait été qu’une tentative utopique de dépasser le capitalisme en se livrant une concurrence à marche forcée contre lui à partir de sa périphérie. Le stalinisme a représenté un détour, une voie de garage, dans l'histoire mondiale du capitalisme.

NPNF Même remarque sur le stalinisme. Il existe une pluralité d’explications. Le point d’accord minimum est d’affirmer qu’il s’agit d’un système d’exploitation qu’il était erroné de défendre, même contre « l’impérialisme ».

ND : C’est un peu court, comme explication, et ça fait l’impasse sur le fait que la nouvelle bourgeoisie russe soit en majeure partie issue de l’appareil du PCUS, comme c’est le cas dans la plupart des autres pays de l’ancien bloc de l’Est. Plutôt qu’une tentative de dépasser le capitalisme, il s’agissait de le mettre ne place sous la conduite de l’état – ce qui est conforme d’ailleurs aux discussions des socialistes russes dès le début du 20e siècle. En outre, on ne peut laisser de côté la spécificité du capitalisme chinois sans oublier un cinquième de l’humanité… La marche forcée vers le capitalisme sous conduite maoïste, puis post-maoïste peut difficilement être qualifiée de voie de garage.

15. Le capitalisme s’est étendu à tout le marché mondial et a pu englober pour la première fois le monde entier. Son expansion a entraîné aussi un accroissement de la force numérique de la classe ouvrière et des liens internationaux objectifs entre les fossoyeurs du capitalisme. Mais ce phénomène s'est produit après les défaites et les échecs de la gauche à la fin des années 70 et dans les années 80, et après le choc profond, pour la culture de la « gauche réellement existante », provoqué par l'effondrement du stalinisme. L’ascension politique de la droite néo-libérale et l’inégalité croissante entre les riches et les pauvres ont façonné l’expansion capitaliste et ont été façonnées par elle.

NPNF La « gauche réellement existante » me semble un concept un peu flou. Préciser ?

ND : Il faudrait être plus précis. Ce qui s’est développé, en l’occurrence, ce n’est pas le caractère mondial du marché – il l’est depuis plusieurs siècles – mais son unité, avec la diminution vertigineuse des barrières douanières, et la généralisation de la condition prolétarienne (le plus souvent, sous la forme du chômage) et du salariat. Par contre, tout à fait d’accord pour insister sur la croissance de la classe ouvrière.
Il faudrait lier de façon plus claire les phénomènes entre eux. Les luttes sociales des années en Europe 70 jouent un rôle important dans la globalisation du capital, en poussant la classe capitaliste à employer l’industrialisation du tiers-monde comme alternative et moyen de briser les « forteresses ouvrières » et les revendications sociales. La gauche (social-démocrate et post-stalinienne) a sans doute échoué à porter les revendications ouvrières, mais était-ce réellement son rôle ? Si on admet qu’elle avait pour fonction essentielle de briser cette même classe ouvrière de façon plus efficace et plus radicale que ne le saurait faire la droite, on devrait plutôt parler de son succès.
Le néo-libéralisme n’est pas plus de droite que de gauche, puisqu’il est l’idéologie commune de la social-démocratie et des conservateurs. C’est l’idéologie nécessaire de la globalisation, de la restauration de l’état par l’apurement de la dette, d’une conception réellement capitaliste de la souveraineté et de la gouvernance.

16. L’apparition des nouveaux mouvements anticapitalistes de ces dernières années a coïncidé avec l’émergence d’une nouvelle génération de militants « radicaux ». Leurs formes de culture « alternative » leur ont permis de dénoncer les maux du capitalisme, de commencer à imaginer une autre vision du monde, et à former des réseaux internationaux.

ND : Il faudrait caractériser plus nettement ce qui, dans les mouvements « anticapitalistes » actuels, va dans le sens de la communisation, d’un dépassement de la globalisation capitaliste par la globalisation communiste, de la rupture avec la société d’exploitation, et ce qui va dans le sens du retour à l’état-nation, à l’état-providence, voire au formatons sociales antérieures au capitalisme.

17. Tout nouveau mouvement révolutionnaire commence par le refus d'accepter le monde capitaliste actuel et la forte conviction qu'un autre monde est possible. Vu les sens accordés généralement aux mots « socialisme » et « communisme » durant les cinquante dernières années, le fait que les nouveaux mouvements anticapitalistes refusent, pour la plupart, d’employer ce vieux langage est un signe prometteur pour l'avenir. Mais ce choix implique aussi une certaine attitude « antipolitique », une préférence, chez ces nouveaux groupes, pour les actions symboliques, spectaculaires, et les confrontations théâtrales.

NPNF : Je ne suis pas sûr que le refus d’employer des termes socialisme ou communisme soit un signe prometteur pour l’avenir. Surtout quand on sait que les dirigeants du mouvement altermondialiste sont des ex-staliniens ou des toujours tiermondistes : en clair de chauds partisans du capitalisme d’Etat… ou du collectivisme bureaucratique !

18. Il incombe à la gauche marxiste organisée, aux forces qui se battent pour défendre et développer une certaine continuité de la pensée révolutionnaire, d'apprendre de ces nouveaux mouvements mais aussi de les aider à passer d’une attitude « antipolitique » à des stratégies politiques positives.

ND : Que faut-il entendre par « politique » ? S’agit-il simplement de leur enseigner les bienfaits du marxisme, ou s‘agit-il de poser la question du pouvoir politique ?

19. Depuis la mort de Trotsky, les groupes trotskystes qui ont survécu se sont trouvés assiégés et isolés pendant des décennies. Beaucoup de leurs cadres les plus expérimentés et les plus compétents ont été tués pendant la Seconde Guerre mondiale. Leur culture politique a subi un déclin catastrophique. La plupart d'entre eux ont adopté, sous des formes variées, le style d’organisation apparemment « efficace » des partis staliniens. Ils n'ont pas été capables d’affronter correctement les principaux changements qui se sont produits dans le monde depuis un demi-siècle.

NPNF Il faudrait encore une fois élargir les références politiques. Quant à dire que les trotskystes n’ont pas compris les principaux changements depuis 50 ans, on pourrait tout aussi bien dire qu’ils ont commencé par ne pas les comprendre dès 1917 ! La polémique purement interne au mouvement trotskyste n’intéresse que… les trotskystes.

ND : Ce style d’organisation était celui proposé par Trotski, contre ses propres écrits d’avant 1917…Mais peu importe, tout à faut d’accord avec YC sur le fait qu’on n’avancera pas beaucoup en restant dans l’histoire et la mythologie trotskiste. Cette façon de n’exister que dans une généalogie, dans une légitimité historique et une figure tutélaire iconique, plutôt que dans une relation au réel, est précisément ce qui empêche de comprendre les changements.

20. Depuis 1989-1991, les groupes trotskystes connaissent une désorientation croissante : ils ne savent plus définir des stratégies et des notions politiques positives, ils ont tendance à se fondre et à se diluer dans un « anticapitalisme » et un « anti-impérialisme » purement négatifs et réactifs. Par exemple, de soi-disant marxistes ont cherché à conclure des alliances avec l'intégrisme islamique en invoquant son prétendu « anti-impérialisme ». Mais le paléo-impérialisme de l’intégrisme islamiste (ou des Etats qui cherchent à réaliser des conquêtes régionales tels que la Serbie de Milosevic ou l'Irak de Saddam Hussein) est réactionnaire. Une stratégie politique qui est incapable de reconnaître de tels faits n’arrivera pas non plus à aider les mouvements de protestation anti-capitaliste d'aujourd'hui à acquérir une culture nouvelle, révolutionnaire, et potentiellement hégémonique.

NPNF Tout à fait d’accord. Mais cette « désorientation » toujours tous les courants dits révolutionnaires pas simplement les trotskystes. Aucun bilan sérieux n’a été fait du stalinisme par tous les courants. Quant à l’anti-impérialisme ce n’est qu’un sous-produit du tiers-mondisme qui a une longue histoire, à commencer par le Congrès des peuples de Bakou organisé par la Troisième Internationale.

ND : Même remarque que précédemment. A partir du moment où on a constaté que le trotskisme était un produit, par son histoire et ses origines, de la contre-révolution en Russie, il n’y a pas à s’étonner qu’il ne lui survive pas – même si ses appareils cherchent ça et là une planche de salut en se plaçant en remorque de tel ou tel anticapitalisme, tel ou tel anti-impérialisme, comme ils l’ont fait jadis avec les différents courants sociaux-démocrates ou staliniens. Il serait plus fructueux d’analyser de façon critique les notions mêmes d’anticapitalisme et d’anti-impérialisme, d’en mettre en lumière les limites ou au moins, de ramener la notion d‘impérialisme à son concept originel, dont l’acception actuelle n’est qu’une pale copie.

21. Pour créer un cadre favorable à un nouveau mouvement révolutionnaire international uni, il nous faut deux choses : rétablir une politique ouvrière positive, en s’appuyant sur une rénovation et un renouvellement des idées politiques ; définir une nouvelle méthode d'organisation démocratique, rationnelle et anti-autoritaire.

NPNF Le mot anti-autoritaire me va parfaitement. Je ne sais pas quel connotation il a en anglais mais en français il a une connotation nettement anarchiste ou libertaire. Cela est légèrement contradictoire avec les références positives aux bolcheviks, à l’IC et à Lénine et Trotsky qui parsèment ce texte. Il serait bon de développer ce point et que les camarades de l’AWL précisent ce qu’ils veulent dire.

ND : Même question sur l’usage exact du mot politique. S’agit-il de mettre la question du pouvoir politique et de la destruction de l’état bourgeois au centre de l’activité ? Comment concilier cela avec une optique anti-autoritaire sans interroger de manière critique le courant qui s’en réclame ?

22. Ces deux tâches sont inextricablement liées. Il ne peut y avoir de rénovation politique et de réflexion politique vivante face au monde perpétuellement changeant sans de libres discussions. Et il ne peut y avoir de libres discussions sans une organisation qui se soit libérée de tout dogme, de toute indifférence à l'égard de la grande et saine tradition réelle de Lénine et de Trotsky, mais aussi du pouvoir déformateur des grands prêtres, des prophètes autoproclamés ou des collèges de cardinaux des groupes marxistes. Une organisation qui se soit libérée également de toute répression des opinions minoritaires telle qu’elle est pratiquée dans beaucoup dans ces groupes, ce qui entraîne l’apparition de fractions qui combattent pour prendre la place du dictateur ou, si elles perdent la bataille, qui choisissent par facilité de scissionner et de fonder une nouvelle organisation.

NPNF La référence à Lénine et Trotsky sans autre précision « plombe » les autres affirmations contenues dans ce point.

ND : Je constate avec plus que d’ étonnement qu’apparaissent seuls les noms de Lénine et de Trotski, plutôt que celui de Marx lui-même. Mais YC a mille fois raisons de souligner qu’on ne peut pas, sans flirter avec le ridicule, concilier libre examen et figures tutélaires d’une manière aussi leste.

Je ne crois pas plus au culte de l’unité pour l’unité qu’à celui de l’unité théorique. Ce qui détermine le fonctionnement, ce sont les conditions sociales et politiques, les mouvements sociaux, et les objectifs que se fixent le groupe, pas une conception a priori de ce que doit être l’organisation. Le modèle bolchevik initial est celui d’un groupe d’opposition semi-clandestine, avec une direction composée d’intellectuels, dirigée depuis l’émigration et agissant contre un régime policier dans un pays en cours d’industrialisation rapide mais très concentrée. Le modèle Kominternien est celui d’un état policier utilisant des partis politiques comme une courroie de son système d’espionnage et de diplomatie. Tout cela à des implications fondées dans le réel. Dans le cas d’un mouvement de la classe salariée agissant dans une Europe démocratique, rien n’oblige à être ensemble (unité formelle de courants en tout points dissemblables, dont la LCR française est un bon exemple), pas plus qu’à se séparer sur des points de détail qui n’ont pas d’implications directes sur le réel.

Le projet de rénover le mouvement ouvrier implique a minima la critique de ses faiblesses et un ardent travail de propagande pour faire triompher les conceptions nouvelles qui sont supposées y remédier. Il suppose la mise au point d’un nouveau corpus, donc une grande liberté de recherche et de discussion, mais aussi une certaine cohérence dans les fondements de cette critique.

23. Comment peut-on avancer à partir de notre situation actuelle? Il nous faut esquisser des bases minimales, sur le plan organisationnel et politique, pour une unité, au départ assez souple mais solide, qui aurait comme perspective de créer, à terme, une nouvelle internationale socialiste et ouvrière. Nous, groupes et militants individuels de différents pays, nous proposons de contribuer à ce processus en nous mettant d'accord sur une plate-forme internationale. Nous proposerons ce projet à d'autres groupes et militants pour qu’ils le discutent, et nous mettrons aussi d'accord sur quelques activités et discussions sur la base de cette plate-forme.

ND : Et si ‘Internationale, avec ses sections nationales séparées les unes des autres, était précisément l’une des erreurs à ne pas reproduire ? Cela mériterait au moins d’être discuté.

24. Voici les principales bases d’accord politiques que nous proposons :

25. Travailleurs de tous les pays, unissez-vous ! A la mondialisation du capital, opposons la solidarité internationale ! Contre toutes les guerres, excepté celles de libération nationale ou sociale !

ND : Ca commence plutôt mal. Il vaudrait mieux opposer la communisation mondiale à la mondialisation du capital, plutôt que la solidarité qui est assez abstraite dans ce contexte. Et si l’on prévoit déjà deux exceptions, dont l’une mériterait à tout le moins une solide discussion : les luttes de libération nationale apparaissent ici en contradiction avec le jugement négatif sur le manque de distinction entre socialisme et « stalinisme révolutionnaire » de la nouvelle gauche. Quand à la guerre de libération sociale, elle mériterait d’être abordée clairement ; mais cela implique, une fois de plus, de poser clairement la question du pouvoir politique et de la destruction de l’état bourgeois.

26. Le socialisme authentique représente l’exact opposé du modèle stalinien : il vise à remodeler la société selon les principes de la solidarité ouvrière et de la démocratie réelle. Ni l'URSS stalinienne, ni les Etats survivants qui suivent son modèle tels que le Cuba et la Corée du Nord, n’incarnent le socialisme que nous voulons. Au contraire, ce sont des systèmes d'exploitation de classe qui ne sont nullement post-capitalistes, mais des régimes autocratiques qui suppriment toute vie politique indépendante pour la classe ouvrière.

ND : Le communisme n’est pas la solidarité ouvrière, mais l’abolition de la condition ouvrière, l’abolition de la classe ouvrière, du salariat et du travai, le libre développement de l’activité humaine. C’est une distinction importante, car il reste encore toute une mythologie de l’apologie de l’ouvrier et du travail, une conception d’une société fondée sur le modèle des valeurs réelles ou supposées de la classe ouvrière -– alors que celle-ci n’existe comme classe que dans le rapport social capitaliste – en contradiction totale avec les aspirations des ouvriers eux même (et des écrits de Marx, mais c’est moins grave).

27. L'auto-émancipation de la classe ouvrière est le principal moyen d’arriver au socialisme. Nous combattons donc pour l'indépendance politique de la classe ouvrière et nous nous opposons à tout « front populaire ».

28. Le contrôle ouvrier et la planification démocratique sont les seuls moyens d’empêcher la classe capitaliste de détruire l'environnement de la planète car la bourgeoisie cherche uniquement à augmenter au maximum ses ventes et ses profits.

NPNF Les deux revendications ci-dessus sont des tartes à la crème trotskystes depuis 70 ans. Il me semble dommage de réduire la propagande socialiste à des mots d’ordre vagues qui peuvent être repris et ont été repris par toutes sortes de tendances réformistes qui ont vidé ces mots de leur sens ou lui ont donné un sens parfaitement capitaliste.

ND : D’accord avec YC. Cela demanderait a être très largement précisé. Le contrôle d’une centrale nucléaire par ceux qui y travaillent ne la rend pas moins nocive pour l’environnement – c’est une question qui concerne toute l’humanité, pas seulement celles etc eux qui y travaillent. Et la planification n’est pas en soi une panacée : son contenu réel reste à définir. A la rigueur, une déclaration d’intention sur le développement durable aurait moins le mérite de tenir compte du vocabulaire actuel.

29. Pour une orientation en direction de la classe ouvrière et du mouvement ouvrier tels qu'ils sont, afin de transformer le mouvement ouvrier. Soutien actif et participation aux luttes des travailleurs à tous les niveaux, y compris les plus petites actions syndicales pour défendre et étendre les acquis sociaux. Pour la démocratie et le débat ouvert au sein du mouvement ouvrier ; pour l’organisation des militants de base au sein des syndicats. Pour la promotion de la représentation politique de la classe ouvrière, ce qui signifie, dans de nombreux pays, la lutte pour créer un nouveau grand parti des travailleurs.

NPNF : Pourquoi limiter les perspectives des luttes aux seuls syndicats qui ne représentent généralement qu’une infime partie ne serait-ce que des effectifs de la classe ouvrière ?
Le parti des travailleurs : quel contenu ? L’expérience du PT montre que ce n’est pas une recette magique, loin de là ! En quoi les prochaines expériences, si elles se produisent, seraient-elles différentes ? Quels garde-fous se donner ?

ND : Le point de vue est ambigu, car sous-tendu par une apparente extériorité. Je ne cois pas que l’AWL soit essentiellement composée de rejetons de la bourgeoisie qui veuillent « aller au peuple » ou amener à la classe ouvrière la conscience de la petite-bourgeoise. Et si ses militants sont pour l’essentiel des salariés, alors il faut partir de là. Par contre, d’accord avec YC pour nuancer sur la question syndicale : il faut partir de la réalité des luttes et des situations syndicales. On ne peut raisonner de la même manière en Angleterre, en France, en Allemagne ou en Chine sur la question syndicale, de même qu’on aborde pas les luttes sociales de la même manière dans une usine de 10 000 ouvriers, dans une autre de 150, dans un collège, dans un fast-food ou dans une entreprise de nettoyage où le travail au black domine. Une orientation partant de la classe ouvrière implique une connaissance profonde de toutes ses nuances, une évaluation des possibilités et des formes de luttes applicables dans chaque secteur, pas le placage d’un cadre idéal – dont la validité ne fait, elle, l’objet d’aucun examen critique.

30. Pour un gouvernement des travailleurs, un gouvernement fondé sur les organisations fondamentales de la classe ouvrière et responsable devant elles ; un gouvernement qui défendrait les intérêts de la classe ouvrière contre la résistance des capitalistes: pour la restauration des droits syndicaux, la reconstruction des services publics nationalisés sous le contrôle des travailleurs et de la population, la taxation des riches et l’expropriation des grands groupes capitalistes, etc.

NPNF : Total désaccord. Ce point est repris des thèses de la Troisième Internationale, où les PC envisageaient des gouvernement communs avec la social-démocratie dans une période qu’ils jugeaient pré-révolutionnaires. La situation n’est pas pré-révolutionnaire, il n’existe aucun parti révolutionnaire de masse et ces schémas n’ont jamais marché.
Concrètement ils ne servent qu’à justifier un vote systématique pour les PC et les PS et un soutien critique à ces partis quand ils au gouvernement par des minorités révolutionnaires.

ND : De quoi parle-t-on exactement ? S’il s’agit d’un gouvernement révolutionnaire, issu d’un vaste mouvement social et d’une confrontation avec l’état capitaliste, alors on les très en dessous des tâches essentielles. Sinon, on est dans le populisme (faire payer les riches). Le thème de la nationalisation est au mieux un retour au welfare-state et au socialisme d’état – en contradiction avec le « contrôle ouvrier » proposé quelques points plus haut. Le terme « Socialisation » conviendrait mieux. Le meilleur point, c’est la restauration des droits syndicaux – mais quel désaveu pour Trotski…

31. Nous combattons pour une démocratie solide et cohérente, parce qu’elle est pour nous la base du socialisme, mais aussi parce qu’elle doit être défendue tous les jours, dans les batailles partielles immédiates sous le capitalisme, au plan national comme international. Les travailleurs de chaque pays doivent faire appel à tous les travailleurs du monde pour leur assurer qu'ils ne tolèrent aucune oppression pour eux-mêmes comme pour les autres prolétaires ; ils veulent l'égalité de tous sans détenir le moindre privilège sur les autres. Solidarité avec les Palestiniens et soutien des droits d'Israël : deux nations, deux Etats. Pour une Irlande libre, unifiée, et le droit à l’autonomie pour les zones à majorité protestante du Nord-Est.

NPNF : La notion de démocratie demanderait à être développée. Tout ce texte est très discret sur ses formes d’organisation concrète. De la démocratie athénienne à celle de la Cinquième république, en passant par la Commune de Paris, il y a quelques différences utiles à préciser en fonction des expériences révolutionnaires passées.

ND : Il y a, si mes souvenirs sont bons, près de 81 conflits actuellement dans le mondes, et bien plus encore d’ethnies, de cultures ou de populations opprimées à un titre ou à un autre. Alors pourquoi la Palestine et l’Irlande plutôt que le Tibet, les Mapuches, les Karens, les Inuits, les Berbères, les Sahraouis,… ? Soit on en reste aux principes généraux (et généreux), soit on donne une liste claire et crédible.

32. Pour la solidarité internationale contre le capital international. Nous ne cherchons pas à arrêter la mondialisation ni à ce que l’histoire fasse marche arrière. Nous voulons plutôt mobiliser toutes les nouvelles forces et passions générées par le développement mondial du capitalisme pour atteindre la libération de l’humanité.

NPNF : La formule sur la mondialisation me semble maladroite

ND : Ca pourrait effectivement être reformulé, mais l’idée est meilleure que ce qui a été écrit précédemment – et en contradiction avec bien des ambiguïtés du texte.

33. Pour un « Troisième Camp »: une position indépendante de la classe ouvrière qui s'oppose à la fois à l' « impérialisme du libre échange » (à l' « Empire du capital ») dirigé par les Etats-unis et aux forces impérialistes régionales qui pourraient éventuellement entrer en conflit avec celui-ci.

34. Pour la libération des femmes, contre le racisme et les contrôles migratoires, pour l'égalité des droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres.

ND : Un peu dommage que tout cela n’apparaisse qu’au point 34… alors qu’ils s’agit de manière évidente de questions centrales de la période actuelle, qu’ils agisse du patriarcat ou des politiques migratoires, qui n’ont pas été abordées dans la parie analytique et qui apparaissent ici en décalage. Une autre organisation du texte, qui sépare clairement la partie historique de l’analyse du monde actuel – assez sommaire – éviterait cela.

35. Pour la construction d'un parti révolutionnaire : non pas une secte vivant dans un isolement autarcique, mais une organisation stimulée par la logique et les besoins de la lutte des classes sur trois fronts : économique, politique et idéologique.

36. Et sur quelle base organisationnelle minimale ?

37. Pour l’organisation politique sur les lieux de travail et dans toutes les organisations de masse de la classe ouvrière sur la base d'une discipline dans l'action décidée par la majorité ;
ND : Il y a divergence avec le point précédent sur les syndicats.

38. Pour des structures démocratiques permettant la libre discussion et les droits d'expression des minorités au sein des différentes structures du parti et dans la presse publique ;
ND : C’est une vision assez formaliste des choses. Le problème n’est pas de avoir comment les minorité peuvent s’exprimer, ce qui est une vision héritée du parti unique, mais comment faire pour que le débat soit réellement possible et qu’il puisse amener de réels changements plutôt que la simple reproduction des différences. Or, cela suppose a minima l’existence d’une formation théorique solide en même temps que, de part et d’autre, une solide culture de la prise en compte de la réalité, du recours à l’analyse scientifique plutôt qu’à la paraphrase dogmatique.

39. Au moins pendant une phase transitoire, pour le droit des minorités d'avoir leurs propres organes de presse à coté de la presse du parti unifié….

Amendement de l’AWL sur l’impérialisme

Au XIXe siècle, le mode de production capitaliste s’est progressivement étendu à toute la planète. Les capitalistes britanniques et leur Etat ont développé des relations capitalistes avec les autres puissances européennes à travers des rivalités commerciales et militaires, mais aussi à travers l’établissement d’une domination coloniale formelle sur un certain nombre de territoires et un contrôle informel sur des Etats politiquement indépendants comme l’Argentine.
A l’apogée de l’impérialisme (entre 1880 et 1945), les puissances européennes, les Etats-Unis, la Russie et le Japon se sont battues pour s’emparer des zones les moins développées du monde. Au début du XXe siècle elles s’étaient réparties la quasi totalité de la planète. Elles se sont ensuite livrées deux guerres mondiales pour se repartager entre elles ces territoires.
La structure de l’économie mondiale et des relations entre Etats a profondément changé depuis 1945. Après la Seconde Guerre mondiale les Etats-Unis sont apparus comme la puissance économique et militaire la plus forte et ils ont pris la direction d’un « impérialisme du libre échange » ou d’un « Empire du capital », dans lequel dominent des impératifs économiques tels que le commerce et la finance. Les principales puissances capitalistes rivales n’ont pas entamé des affrontements géopolitiques et militaires directs. Elles ont préféré former une sorte de cartel sous l’hégémonie des Etats-Unis.
La domination des pays coloniaux et semi-coloniaux a provoqué la création de mouvements nationalistes qui ont combattu pour leur indépendance. La Seconde Guerre mondiale a affaibli les principales puissances coloniales et ces mouvements ont alors été capables de gagner leur indépendance politique, même si cela leur a souvent coûté de nombreuses années de lutte. Un système international d’Etats plus ou moins souverains s’est alors mis en place et s’est substitué aux anciens empires et colonies.
Après 1950, le capitalisme s’est rapidement développé dans ses principales métropoles ainsi que dans certaines zones du « tiers monde » comme le Brésil, le Mexique et la Corée du Sud. Dans ces endroits et dans d’autres tels que Taiwan, Hong-Kong et Singapour, de nouveaux centres d’accumulation du capital ont prospéré. Des puissances sous-impérialistes, ayant des ambitions régionales économiques et territoriales, telles que l’Iran, l’Irak, l’Argentine et Israël sont aussi apparus.
Mais ce nouveau système international est encore « impérialiste » dans la mesure où il exacerbe les inégalités, maintient la domination des économies les plus faibles par les centres les plus puissants du Capital et recourt à l’arme de l’intervention militaire pour créer les conditions favorables à l’accumulation du capital.
L’Union soviétique a instauré sa propre forme d’impérialisme, en maintenant les territoires limitrophes sous le contrôle d’Etats clients. Elle a aussi cherché à étendre son propre territoire, par exemple en envoyant son armée dans des pays comme l’Afghanistan qu’elle voulait contrôler. Mais l’URSS n’a jamais été capable de rivaliser sur le plan économique avec les Etats-Unis et les puissances occidentales.
L’URSS et les Etats staliniens d’Europe se sont aujourd’hui effondrés et leurs territoires ont été aspirés par l’économie mondiale. Les bureaucraties staliniennes de la Chine et du Vietnam ont maintenu leur domination politique sur leurs peuples tout en intégrant progressivement leurs pays dans le marché mondial.
L’hégémonie économique et financière des Etats-Unis perdure jusqu’à aujourd’hui, et son déclin économique a été stoppé. Nous vivons désormais dans un monde où le capitalisme est pratiquement universel.

ND : le récit est globalement correct, mais il reste sur le plan de la géopolitique sans référence à l’analyse de classe, à la formation de la classe ouvrière et au développement du salariat, à l’évolution du rôle des grands propriétaires fonciers (pétromonarchies, états miniers, notamment,…), des transformations et des résistances des « sociétés traditionnelles », etc... Une dose de marxisme dans l’analyse ne ferait pas de mal.

Amendement de l’AWL sur le stalinisme

Durant les années 20, quand la Russie révolutionnaire a été décimée par la guerre civile et est restée isolée internationalement, une bureaucratie a surgi de la fusion entre des éléments du parti bolchevik et des secteurs de la bureaucratie tsariste. Une classe sociale distincte s’est progressivement formée et a instauré sa domination totalitaire sur le pays.
Vers 1928, la bureaucratie stalinienne a détruit les derniers vestiges du pouvoir politique de la classe ouvrière, notamment les soviets, le parti bolchevik et les syndicats. Les staliniens furent aussi capables d’éliminer les Nepmen et les koulaks, pour créer une société d’exploitation dans laquelle la bureaucratie extrayait et contrôlait le surproduit social créé par les ouvriers et les paysans.
Un schéma politique comparable est apparu dans les pays où des partis-armées staliniens sont arrivés au pouvoir, soit directement grâce à l’aide soviétique, soit en effectuant leurs propres révolutions bureaucratiques. Dans les Etats baltes et dans la Pologne orientale, en 1939-1940, puis dans toute l’Europe de l’Est durant et après la Seconde Guerre mondiale, les staliniens ont éliminé les forces indépendantes de la classe ouvrière et les vieilles classes dominantes.
En Chine, l’armée de Mao, créée après la défaite de l’authentique Parti communiste en 1927, construisit son armée paysanne dans les campagnes en s’isolant complètement des ouvriers des centres urbains. Elle a entouré et conquis les villes en 1949, expulsant le Kuomintang, parti bourgeois, et créant un Etat sur le modèle de l’URSS.
Au Vietnam et à Cuba, les staliniens ont à la fois éliminé les organisations de la classe ouvrière et les vieilles classes capitalistes. Ils ont créé des « économies de commandement », sur le modèle de l’URSS, qui exploitent les ouvriers et les paysans.
Les staliniens constituent donc à la fois une force révolutionnaire contre les vieilles classes capitalistes et une force réactionnaire contre la classe ouvrière. Ils n’ont pas créé un système plus progressif, mais plutôt des impasses historiques, des régimes qui ont sauvagement exploité et privé de tous leurs droits les ouvriers. La victoire de la bureaucratie a montré que dans les endroits où la classe ouvrière ne dirige pas sur le plan politique, à travers ses propres organisations démocratiques, elle ne peut pas dominer sur le plan social ou économique.
Les staliniens n’ont jamais été des représentants révolutionnaires de la classe ouvrière et ne seront jamais un exemple à suivre pour les mouvements anticapitalistes.

NPNF : Ce point est intéressant parce qu’il explique les thèses de l’AWL. Mais encore une fois faut-il mettre comme préalable un accord sur les thèses du collectivisme bureaucratique ?

ND : Je ne rentrerais pas dans le détail historique, mais il faudrait expliquer l’apparition de la bureaucratie d’une façon moins sommaire que le seul isolement de la Russie – d’autant plus qu’entre 1917 et 1928, ce ne sont pas les tentatives révolutionnaires qui ont manqué et que les bons conseils du Komintern se sont partout révélés catastrophiques. Il existe plusieurs autres grilles d’analyses qui, si elles donnent rarement à elles seules une compréhension complète d’une situation aussi complexe, permettent de donner un autre éclairage. Et puis, après tout, est-on obligé de passer plus de temps à expliquer la Russie soviétique que ‘le mouvement actuel du capitalisme ?

A propos de l’amendement sur le trotskisme

NPNF : Ce texte reprend intégralement les positions marxistes et trotskystes traditionnelles sur la nécessité d’un Etat ouvrier démocratique, d’un demi Etat, etc. L’expérience historique montre les limites de ces conceptions. Il faudrait au moins en tenir compte, tracer quelques pistes et poser quelques questions plutôt que de répéter le credo.
Idem pour le Front unique. Il me semble légèrement contradictoire de se réjouir que les jeunes altermondialistes se méfient de termes comme socialisme ou communisme, si c’est pour de l’autre côté réintroduire dans le vocabulaire politique des textes qui font partie de la cuisine tacticienne de l’Internationale communiste et surtout des manœuvres des groupes trotskystes depuis 70 ans.
En ce qui concerne les syndicats, limiter les possibilités d’organisation aux seuls syndicats me semble singulièrement réducteur. L’important ce n’est pas le nom des structures d’auto-organisation de la classe ouvrière mais son contenu. Pour le moment les syndicats sont des appareils bureaucratiques intégrés à l’Etat. La situation peut bien sûr changer, mais pourquoi se limiter à une seule perspective possible, comme si le mouvement ouvrier et le capitalisme n’avaient pas changés depuis 1848 ?

Comments

Submitted by Anonymous (not verified) on Mon, 11/07/2005 - 16:25

(Avertissement: le francais n'est pas notre langue maternelle)

Point charactéristique: le Courant de Gauche Révolutionnaire qui systematiquement fait oreille sourde aux appels a la discussion sur le terrain polonais – entre autres il empeche l’acces libre a l’Entente de la Gauche Anticapitaliste – en meme temps il présente volontiers de telles discussions qui se déroulent … a l’Ouest de l’Europe.
Le 18 juin a eu lieu une rencontre de groupes de gauche signée par l’AWL avec participation du Courant de Gauche Révolutionnaire.
La discussion sur la plateforme AWL a pris forme de commentaires faits par Yves Coleman (périodique “Ni patrie, ni frontieres”) et Nico Dessaux (Réseau Mondialiste Révolutionnaire).
Bien que cette discussion apporte des points d’interrogations et questions importantes, elle esemble quand meme nous mener a la répetition de réonses pragmatiques ? la situation courante de crise. Elle ne nous approche donc nullement vers la perspective de la sortie de l’impasse ou s’est trouvée la soi-disant nouvelle gauche radicale qui prétend ici de se présenter comme une gauche révolutionnaire.
La plateforme AWL essaie d’aborder d’une façon ouverte sa propre tradition – le trotskysme. Cependant, aujourd’hui, quand les courants post-trotskystes en quete de solutions pragmatiques sont arrivés jusqu’a questioner les fondements du marxisme – pourtant prétendu etre leur confession de foi (et, en meme temps du bolshévisme), cette ouverture semble ne pas satisfaire les alliés (members de coalition?) eventuels. Rien d’étonnant. Les concessions aux dépends des principes ne sauront guere les satisfaire au moins que ces courants ne crient en fin de compte leur capitulation totale confirmée par la négation meme de leurs sources.
Le chemin vers le précipice s’ouvre déja avec le rejet du terme pourtat fondamantal du marxisme – celui de la classe ouvriere et son remplacement par un terme vague et imprécis “les salariés” (travailleurs). Nous n’allons pas faire ici un éxposé sur cette question que nous avons abordé plus d’une fois dans multiples articles. Nous nous contenterons de souligner que AWL traite les deux notions comme si elles étaient parfaitement remplacables l’une par l’autre. Le terme de classe ouvri?re est réservé aux récits de charactere historique ou celle ou le terme de classe des travailleurs sonnerait au moins bizarrement.
Cet usage n’éveille aucun signe de protestation de la part des deux commentateurs. Il semble m?me que dans leur cas c’est une situation parfaitemetn naturelle car – a juger selon leur commentaires – ils sont des opposants du trotskysme et des courants post-trotskystes, de m?me que protagonistes du rejet de la tradition et signification de la Révolution d’Octobre.
En fait, la controverse entre le marxisme (léninisme ou, en plus général, bolshévisme) et l’anarchisme et la nouvelle gauche radicale concerne ce point: quells sont les intérets que doit représenter la gauche révolutionnaire: ceux de la classe ouvriere ou ceux de “tous les exploités et opprimés” (en ce les intérets des minorités sexuelles)? La controverse a une longue histoire depuis les temps ou la socialdemocratie, et puis aussi les menshéviks (qui suivirent les idées en vogue venant de l’Occident), décident de devenir une représentation de la “totalité de la nation”, c’est a dire, dans le cadre de vision primitive de la société bipolaire ils déciderent de considerer dorénavent la democratie bourgeoise comme substitut des buts de la révolution socialiste.
La décomposition du courant post-trotskyste se fait en étapes dictées par l’aile réformiste de la gauche. En partant du fait de remplacer la classe ouvriere par la base qui devait la remplacer temporairement, passant par opposer Lénine et Trotsky au Marx (ou la tradition démocratique), jusqu’a la confusion concernant l’URSS comme un systeme du capitalisme d’état et la nécéssité – bien proche – de renoncer a l’interprétation bolshévique de Cronstadt, la nouvelle gauche radicale se prépare sa Golgote en éspérant (ainsi que les menchéviks et – aujourd’hui – la SLD – Alliance de Gauche Démocratique polonaise) que leur humilité apportera enfin ses fruits attendus – leur admission parmis la “multitude de gauche” et aux salons de “politically correct” jeunesse radicale. Vaines éspérances!
Plutôt disparaitrait le dernier post-trotskyste qui y tiendrait. Cette perspective est d’ailleur prévue par Y. Coleman et N. Dessaux qui sans fausse gene formulent l’avis que le trotskysme comme courant tout a fait engendré et dépendant du stalinisme a perdu toute raison d’etre avec la chute de l’URSS et du bloc d’Est.
L’affaire est bien claire. L’évolution conséquente de la gauche radicale fondée, comme on prétend, sur l’analyse adéquate des changements du monde contemporain, la mene inextricablement a la conclusion que le marxisme orthodoxe est une doctrine dogmatique et périmée. En fait, cette évolution n’est pas le résultat d’une concordance avec la réalité, mais le vieux conflit entre le marxisme et l’anarchisme (les anarchists ne limitent pas leur critique d’autoritarisme aux seuls successeurs bolshéviks du marxisme, mais ils les attendent déja sur le terrain de la vieille bataille qui a eu lieu au sein de la I Internationale). Ce conflit s’est enflamé de nouveau, dans un cadre nouveau, a l’occasion de l’opposition au projet de Lénine de transformer le partie socialdémocrate russe en parti discipliné (soumis entierement aux tâches prolétariennes) qui serait le contraire du principe anarchisant (et reflétant le nouveau visage de la socialdémocratie réformiste), celui des “cercles” ou, comme nous le dirons aujourd’hui – le principe du parti pluraliste ouvert a la “multitude” d’éléments radicaux de points de vue les plus variés.
Ce parti n’aurait pas les moindres chances meme de menacer de quelconque mani?re par l’éclat d’une révolution prolétarienne. Il n’est pas possible de mener une révolution grâce au concert général de la majorité écrasante – ce concert est impossisble pour le temps qui est nécéssaire pour faire stabiliser le nouveau syst?me politique et garder les acquis du prolétariat.
Les conséquences de passer sur les positions menchévik des post-trotskystes d’aujourd’hui sont: le rejet de la dictature du prolétariat (ils essaient d’esquiver le probleme par l’élargissement de la notion de la classe ouvriere a toute la “population qui vit du travail salarié”) et, les grands mots a part, ils évacuent le terrain de la défense de la Révolution d’Octobre pour un compromis pourri avec les anarchistes.
En meme temps, il est curieux que les commentataires du projet AWL sont moins enthousiastes que les post-trotskystes eux-memes du fait que la jeunesse alterglobaliste renonce a l’usage des mots “compromis” comme “socialisme” ou “communisme”. AWL voit dans ce fait la preuve de la victoire du trotskysme sur le stalinisme. Mais cette victoire est celle de Pyrrhus, car elle se fait au prix du rejet du contenu de ces mots et non a cause de la compréhension de la différence subtile entre le communisme des staliniens (“stalinistes révolutionnaires”) et post-trotskystes. Les partisans les plus ardents de cette “nouvelle ligne” sont pourtant … les stalinistes a la tete de l’ATTAC.
Le conflit concerne les principes et non pas les slogans. La lutte pour la définition du mot “communisme” se déroule autour des intérets de la classe ouvriere qui doivent etre défendus avec la plus grande conséquence et non pas autour de la signification du mot tel quel qui, sans son contenu prolétarien est vide de sens et dans de pareilles conditions peut aussi bien etre remplacé par des mots comme “communion” ou “communautarisme”.
En un seul mot, la recherche des possibilités de la critique du marxisme et du bolshévisme de gauche mene a la reconnaissance de divers groupes d’opprimés comme se substituant a la classe ouvriere. Cet embrouillement du probl?me par le moyen d’élargir la notion et la remplaçant par la “classe des travailleurs” est un pas de plus sur le chemin spécifique dans l’histoire de la capitulation idéologique (avec son précédant peut-etre dans l’histoire du christianisme qui – en vocabulaire contemporain – se serait transformé du mouvement de classe pour la lutte d’indépendence nationale a une forme de psychothérapie de la société blazée de Rome en train de sa chute).
En récapitulant, les post-trotskystes dans leur discussion avec les anarchists font figure de quelqu’un qui prend sur soi les péchés des ancetres et reste sur la défensive: le reproche d’autoritarisme avant tout.
Cependant, on voudrait dire que justement parce que Staline a renoncé aux principes bolshéviques (en faisant marche arriere au menshévisme – tellement “réaliste”!) a causé de terribles repressions et le mode autocratique de direction du parti et de l’état (ses fameux zig-zags) qui se sont ajoutés aux difficultés réelles en ce qui concerne le maintien des acquis de la révolution.
Les méthodes de lutte des menchéviks (dont la façon de penser Rosa Luxembourg partageait jusqu’a sa sortie de la prison et qu’elle a abandonné d?s qu’elle a pris connaissance de la véritable situation des bolshéviks) montrent que le bel ésprit des intellectuals change en villain reniement des principes de démocratie si cela peut bien servir leur propre cause. Les anarchistes ont tout aussi renié leurs beaux principes. La seule opposition du terme de l’ouvrier qualifie a celui d’ouvrier spécialisé suppose l’attitude peu sympathique de sexisme car c’est justement la proletarisation des ouvriers spécialisés avait ouvert la possibilite d’émancipation des femmes des couches autres que l’aristocratie (et, dans une certaine mesure, la paysannerie).
La capitulation des principes de démocratie dont la socialdémocratie tellement culturelle d’Allemagne s’est vantée – contrastée a l’”Asiate” de Lénine – apparaît surtout au plein jour si l’on considere le sort de Rosa Luxembourg. L’analogie entre Staline et la socialdémocratie semble plus convaincante que les lieux communs sur la resemblance entre le fascisme et le communisme. En effet, la seule chose que le communisme et le fascisme avaient jamais de commun c’était la socialdémocratie. Le communisme issu de la socialdémocratie qui, en voyant avec horreur son batârd s’est tournée vers les fascistes en choisissant la … démocratie.
La tentative de sortir du cercle des contradictions et empetrement qui font impossible quelconque perspective pour les post-trotskystes au moyen de discussion qui acc?pte les conditions anarchistes et libertaires est une impasse. La seule solution satisfaisante pour ces tendences aurait été le suicide des post-trotskystes comme courant historique.
Nous devons admettre que pour des marxistes orthodoxies cette solution semble aussi prometteuse de créer enfin les conditions d’une confrontation ouverte et honnete (qui ne fasse pas semblant d’?tre ce qu’elle n’est pas) avec les courants qui cont?stent ouvertement le marxisme.
Les post-trotskystes font tout pour obscurcir cette confronatation et pour que ses résultats soient insuffisants, en un mot – ils font tout leur mieux pour s’enfoncer dans ce marécage.

Le 11 juin 2005
Ewa Balcerek et Włodek Bratkowski

Submitted by Olivier_Rubens on Sun, 06/01/2013 - 13:11

Ne serait-il pas possible de refaire la traduction de la contribution des camarades polonais à partir d'une version en anglais de leur texte originel ? Parce que en l'état leur texte est incompréhensible...

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